Mourir au monde – Claire Conruyt

Face à la candeur de sa postulante, Sœur Anne croule sous le poids de son orgueil. Elle qui se croyait martyre. Elle était une parjure, enfermée dans une spirale de souffrance qui, croyait-elle, justifiait son choix de vie. Mais sa vocation est devenue un trou noir. Devant la joie béate de Jeanne, elle ne peut s’empêcher de se poser une question : a-t-elle déjà été aussi heureuse, même au tout début ?

Mourir au monde, Claire Conruyt
Editions Plon, 2021

Présentation éditeur :

L’histoire d’une rencontre entre deux femmes, deux religieuses, deux générations.

Sœur Anne ne s’est jamais véritablement adaptée à la vie en communauté au sein du couvent où elle vit pourtant depuis vingt ans. Lorsque Mère supérieure la charge du patronage de Jeanne, une jeune postulante, se réveillent en elle des sentiments et des questions que la règle conventuelle lui avait fait oublier.
Bientôt, la relation entre les deux femmes dépasse le cadre de la formation. Jeanne est une bouffée d’air frais pour les religieuses. Mais elle bouleverse l’existence de Sœur Anne qui, à ses côtés, aperçoit la possibilité de ressaisir le sens de sa vocation et de se retrouver elle-même.
Quelle place reste-t-il pour l’affection et pour l’humanité quand entrer dans les ordres exige de se défaire de soi-même et de s’abandonner à Dieu ? Comment la communauté peut-elle comprendre que la délivrance de Sœur Anne, pour qui la foi ne suffit plus, repose entièrement sur sa relation avec Jeanne ?

Dans un style limpide et poétique, ce premier roman qui renverse la structure classique du récit d’initiation peint avec clarté et pudeur la confusion des sentiments.

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Quand Jeanne entre en tant que postulante au couvent, cela fait déjà vingt ans qu’Axelle est devenue sœur Anne. Vingt ans et pourtant, l’adaptation de sœur Anne n’est toujours pas terminée. Sa foi n’est plus suffisante pour avancer. L’arrivée de Jeanne, emplie d’une foi profonde, est alors une bouffée d’air frais et de jeunesse.

Les années ont figé les sœurs. Certaines sont parvenues à atteindre une innommable paix. D’autres bataillent encore. Quoi qu’il en soit, leur expression est la même : les yeux fermés, le front contre les mains qui nouent une prière. Si bien qu’un spectateur crédule serait bien incapable de différencier une religieuse abattue d’une religieuse bienheureuse. Il n’y a que le vernis. Et si, sous la surface, le chaos tremble, il tremble silencieusement.

D’emblée on entre dans ce couvent dans lequel règnent silence et simplicité. L’ambiance est très monastique et assez pesante malgré la jeunesse et la joie apportée par Jeanne. L’atmosphère mystique est renforcée par l’écriture de Claire Conruyt qui est légère et claire, je n’irai pas jusqu’à dire pieuse, mais assurément sans fioriture. C’est limpide, pour un résultat délicat et empreint d’une belle pudeur. On ressent fortement la lourde pénitence dans laquelle Anne s’est enfermée.

Par orgueil, tu as décidé de vivre dans la douleur.

La relation entre Jeanne la postulante et Anne la nonne est très intéressante. On les voit évoluer ensemble. Tout est nouveau pour sœur Anne qui a quitté la vie civile à l’aube de sa jeunesse. C’est aussi l’occasion aussi de plonger dans le passé d’Anne.

C’est lent, c’est contemplatif. Les personnages sont là et absents à la fois. Il flotte une ambiance triste et ennuyeuse, une atmosphère lourdement chargée de culpabilité, adoucie par l’enthousiasme et la fraîcheur de Jeanne. Leur affection mutuelle grandit au fur et à mesure que les doutes d’Anne s’immiscent dans son quotidien et la déstabilisent.

Elles sont « la première fois » de l’une et de l’autre, et cela a quelque chose d’imprévisible. Amantes qui ne connaissent pas la chair et sœurs qui ne partagent pas le même sang : que peuvent-elles faire de cela ? Elles se découvrent, chaque jour.

En bref, Mourir au monde est un premier roman, court et lent, contemplatif aussi par lequel je n’ai pas été emporté. J’attendais beaucoup de ce texte au sujet rarement traité et j’ai été déçue. Cela ne m’empêchera pas de lire le prochain livre de Claire Conruyt car malgré tout, j’ai été séduite par sa plume prometteuse !

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